Génération Rose – Génération 2 – Chapitre 13

Le temps reprend petit à petit son cours, suite à l’enterrement de Maman. Ryan ait même passé à la maison après s’être recueilli ce jour-là, faisant ainsi la connaissance de Joy. Elle se demandait qui était cet homme inconnu mais il a fini par réussir à l’apprivoiser. Je crois qu’un regard a suffi pour le rendre fou de sa nièce.
En même temps, elle est mignonne, ce n’est pas bien compliqué.
Je n’ai pas vu Roxane par contre dans les jours suivants. Ryan m’a dit qu’elle n’a pu passer qu’en coup de vent, le temps d’aller au cimetière dire au revoir à maman. Elle n’a pas été le voir avant de repartir. Elle n’était pas très heureuse de ça d’après Ryan, mais apparemment, elle n’a pas eu le choix. Avec son travail, elle a un planning très serré en ce moment.
Quant à moi, j’ai repris le travail. Mes responsables m’ont proposé de prolonger mon congé mais j’ai refusé. J’ai besoin de travailler. Cela me fait du bien et cela me permet de penser à autre chose. Et puis, Maman n’aurait pas voulu que je continue à me morfondre éternellement. Elle voudrait que je continue à vivre ma vie.

Alors, je profite de mes journées en dehors de la maison, à San Myshuno. Lorsque j’ai terminé mes tâches, je continue de découvrir de nouvelles spécialités culinaires. J’adore ça et ça permet de varier les plaisirs ! Même si je ne suis pas encore très douée avec les baguettes, lorsque je mange des spécialités asiatiques.
Eh beh, c’est pas votre fort les baguettes ! Me taquine un jeune homme, assis en face de moi à table, face au stand de nourriture.
-On fait ce qu’on peut ! Haussé-je simplement les épaules. En même temps, c’est plus facile de manger avec une fourchette !
-Faut pas manger asiatique si vous préférez les fourchettes !

Je lève les yeux au ciel face à sa réponse, mais je suis loin d’être vexée. Je vois bien qu’il plaisante. Nous discutons même un moment à table pendant que nous déjeunons. Même lorsqu’il a fini de manger, il continue de me tenir compagnie.
En toute honnêteté, je crois qu’il a une idée derrière la tête. Son ton, amical dans un premier temps, se fait plus charmeur au fil de notre conversation. Je fais mine de ne pas l’avoir remarqué mais je me prête volontiers au jeu. Cela m’amuse et je dois avouer qu’il est tout à fait charmant. Il n’y a rien de mal à s’amuser !

Je ne vois pas le temps passer, en sa compagnie. Je ris à ses blagues, je l’écoute avec attention et je me laisse charmer petit à petit. Cela me vide l’esprit, de flirter avec lui. J’oublie que je viens de perdre ma mère, et que je suis encore en deuil. Je me sens un peu plus légère, oubliant que la nuit est en train de tomber. J’envoie même un petit SMS à mon père pour lui dire que je vais rentrer tard, pour ne pas qu’il s’inquiète.
Et puis, dans un élan de folie, j’embrasse cet inconnu. Il est surpris, mais ne se plaint pas. Quant à moi, cela me fait plaisir et ça m’amuse.

Il finit par répondre à mon baiser. Et nous continuons à nous embrassons, s’amusant de l’effet que nous faisons à l’autre. Mon esprit est ailleurs et cela fait du bien. Je me fiche que je ne le connaisse pas, le courant passe entre nous et c’est tout ce qui m’intéresse. Je le reverrai probablement jamais et cela me convient parfaitement.
A un moment, il m’avoue qu’il habite dans l’immeuble d’à côté et me propose un dernier verre. Sur un coup de tête, un coup de folie, j’accepte, sachant parfaitement où je mets les pieds. J’en ai envie, alors, à quoi bon se prendre la tête ? Je veux simplement m’amuser et lui aussi. Nous sommes deux adultes consentants, et c’est tout ce qui importe.

Je suis rentrée dans la nuit pour ne pas inquiéter mon père, mais j’ai passé une excellente soirée. Cela m’a fait du bien de passer du temps dehors et de penser à autre chose. Et je n’ai pas envie de me prendre la tête…
Mais le lendemain, je culpabilise un peu. En passant dans le couloir, j’entends que mon père est dans la salle de bain, sans doute en train de prendre son bain. Je l’entends pleurer… Je n’aurais peut-être pas du le laisser seul hier soir… Mon cœur se serre en l’entendant. Il prend sur lui devant Joy et moi, mais je sais que le décès de Maman le bouleverse et le perturbe, plus qu’il ne le veut bien le montrer. Je m’inquiète pour lui et pour sa santé… Rien qu’hier matin, il m’a dit trois fois qu’il allait faire beau, et pas trop froid. J’espère qu’il finira par aller mieux et que ces petites pertes de mémoire ne sont pas irréversibles…

Après le travail, Manon m’appelle pour me proposer de passer chez elle. N’étant pas pressée, Papa étant parti à Brindleton Bay avec Joy pour garder les triplés de Ryan, j’accepte sans hésiter. Dès que je débauche, je me rends directement au Quartier de la Mode pour aller à l’appartement de ma meilleure amie et sa petite amie.
Oui, parce que Caroline et Manon forment un couple et ont décidé de s’installer ensemble. Le propriétaire de l’ancien appartement de Manon vendait et elles ont saisi l’occasion. D’autant plus que Caroline était plus que ravie d’avoir de la compagnie chez elle après le décès de son père.
-Salut salut ! Tu vas bien ? Salué-je mon amie en entrant dans l’appartement, tandis que Manon est devant la télévision.
-Nickel et toi ? J’allais mettre un film sur Simflix, ça te tente ? Me répond-t-elle joyeusement.
-Ca va aussi et ma foi pourquoi pas ! Elle n’est pas là, Caro ?
-Non, elle est passée voir sa mère. Pas sûre que tu la vois aujourd’hui !

-Elle s’en sort d’ailleurs, maintenant qu’elle est toute seule ? Lui demandé-je alors, en faisant référence à la mère de Caroline.
-Oh oui, je crois qu’elle est plutôt soulagée de ne plus avoir son mari dans les pattes ! Me répond avec franchise Manon. D’après Caro, l’ambiance est meilleure depuis qu’il n’est plus là. Et puis, elle n’est pas vraiment toute seule, puisque Pierre vit toujours là-bas.
-Sérieux ? Il n’a toujours pas quitter le nid depuis le temps ? Ca me fait penser que ça fait un baille que je ne l’ai pas vu cet andouille !
-Il a trop peur que tu lui parles de couches et de biberons toute la journée ! En plaisante aussitôt Manon. Et oui, il est bien parti pour être un Tanguy car il n’a aucun envie de partir de chez sa mère.
-Et il espère trouver une copine comme ça ?
-Je crois que ça l’arrange, au contraire ! C’est le seul des trois qui n’est pas fichu de se caser !

Je passe un bon moment avec Manon, devant un film d’action qu’elle a choisi sur Simflix. Ce n’est pas tellement ma tasse de thé mais je fais rarement ma difficile sur le programme télé. L’important est de passer un bon moment entre amies, et nous sommes tellement occupées à nous moquer gentiment de Pierre le Tanguy que je ne prête pas grande attention au film.
Cela me fait penser que je devrais le revoir un jour. Autant j’ai pu croiser Paul rapidement lorsqu’il est rentré pour l’enterrement de son père, Pierre était au abandonné absent. D’après Caroline, il avait soit disant mieux à faire. A mon avis, il est parti oublier dans un bar ou dans les bras d’une jolie fille. Fidèle à lui-même quoi.

C’est le cœur léger que je finis par quitter l’appartement. Manon a reçu un appel de Caroline, lui proposant de la rejoindre chez sa mère à Oasis Springs. Je pars avant elle afin de la laisser tranquillement se préparer à partir.
Cela me fait plaisir de l’avoir vu, même si j’aurais aimé voir Caroline aussi. Elles forment toutes les deux un joli couple et cela m’a fait plaisir d’apprendre qu’elles sont ensembles. Elles méritent toutes les deux d’être heureuse et cela a l’air d’être visiblement le cas. En tant cas, je n’ai jamais vu Caroline aussi épanouie.

Il fait encore jour lorsque je sors de l’immeuble. Je dois avouer que je suis assez embêtée car je ne sais absolument pas quoi faire de ma journée. Je pourrai rejoindre Papa à Brindleton Bay, mais il sera probablement sur le départ le temps que j’arrive là-bas. Et je n’ai pas spécialement de me retrouver toute seule à la maison.
Alors, je fais un tour dans le quartier de la mode. Je visite un peu, regarde les devantures de magasin. Tout est hors de prix ici mais il n’y a rien de mal de rêver un peu.
Il m’arrive aussi de croiser des gens qui me reconnaissent, de par les actions que je mène dans l’association. Cela me fait plaisir de les voir, ou revoir, et de discuter un peu avec eux. Si je peux parler des prochaines actions de sensibilisation aux droits des femmes, je ne vais pas me gêner !

Puis, je me pose sur un banc. J’observe le décor urbain autour de moi. J’aimerai beaucoup vivre ici. Un jour peut-être, mais pas toute suite. Je ne me sens pas encore de vivre toute seule avec Joy… Mais j’ai surtout peur pour mon père. Il fait des efforts mais je sais qu’il ne s’est pas encore remis de la mort de Maman et sa mémoire se fait défaillante. Je n’ai pas envie de partir pour ensuite apprendre qu’il est mort dans un incendie parce qu’il aura oublié un truc sur le feu…

Je laisse mes pensées divaguer, essayant de penser à autre chose. La santé de mon père a tendance à me préoccuper et je ne veux pas me laisser submerger par mes inquiétudes. Malgré ses étourderies, il est encore parfaitement autonome et il n’a pas lieu de s’inquiéter pour le moment. C’est juste le temps qu’il se fasse à l’absence de Maman…
-Rosie ? M’interpelle soudainement une voix masculine, en sortant brusquement de mes pensées.
Aussitôt, je sursaute. Je ne m’attendais pas à ce qu’on vienne me parler. Surtout par mon surnom, et non mon prénom. Curieuse, je lève alors la tête vers …
Je me fige, n’en croyant pas mes yeux. Mais comment est-ce possible ? Ce n’est pas possible ! Ca ne peut pas être lui ! Il ne peut pas être ici ! C’est impossible !
Et pourtant…

-Sven ?!

… Il est bel et bien devant moi.

-Bonsoir, Rosie…. Me salue-t-il, sur un ton embarrassé.

Génération Rose – Génération 2 – Chapitre 12

Les jours ont passé depuis le décès de Maman. Son absence règne en maître dans la maison et j’ai encore du mal à accepter l’idée qu’elle ne soit plus là. Comment peut-on être ici, plein de vie et en bonne santé et l’instant d’après, n’être plus qu’un corps sans vie ? Cela me parait tellement insensé, alors que cela fait seulement partie de la vie.
Je fonctionne au ralenti depuis ce jour. J’ai appelé mon travail, mes responsables m’ont accordé quelques jours de congés exceptionnels. Une collègue est passée un soir à la maison avec un énorme bouquet de fleurs, de la part de toute l’association. Ils sont vraiment adorables et je reçois sans cesse des massages de soutien de leur part. Cela ne remplace pas l’absence de ma mère, mais cela me réchauffe un peu le cœur.

Aujourd’hui, c’est le jour de l’enterrement de Maman. La Faucheuse nous a laissé son urne mais ils nous a fallu quelques jours avec Papa pour organiser une petite cérémonie, pour pouvoir lui dire au revoir une dernière fois.
Papa… Il n’est plus que l’ombre de lui-même. Il fait des efforts pour paraître fort devant Joy et moi, mais je ne suis plus une enfant. Je vois bien qu’il est perturbé. Je remarque bien qu’il s’embrouille dans ses paroles et il commence à radoter. Cela me serre davantage le cœur de le voir ainsi. Je ne m’étais pas préparée à ça. De voir ma mère partir, d’aider mon père du mieux que je pouvais…
Et de gérer Joy …

J’étais désemparée par la mort de Maman. Après le départ de la Faucheuse, il est resté assis sur le lit, enfermé dans son mutisme. Nous étions là, tous les deux, à observer l’urne qui contient les restes de Maman. Et puis, le visage de ma fille s’est imposée dans mon esprit. Je n’arrivais pas à la gérer au quotidien, comment pourrai-je lui annoncer une nouvelle pareille ?
Mais je n’ai pas eu le choix. Je suis sa mère, c’est mon rôle de prendre sur moi et de lui expliquer ce genre de chose. Et mon père n’était pas en état….
Alors, je suis allée dans la chambre de ma fille. Sans surprise, sans doute réveillée par nos cris, Joy était déjà réveillée. Elle m’observait avec ses grands yeux bleus et une moue inquiète. Elle devait sentir que quelque chose d’anormal était en train de se passer.
-Joy… ma puce… Lui ai-je soufflé d’une voix douce, en m’agenouillant devant elle pour me mettre à sa hauteur.
-Mamie ! Je veux Mamie ! S’exclamait-t-elle aussitôt en secouant la tête de droite à gauche. Mon cœur s’est serrée, repensant au drame qui venait de se passer. Comment pouvais-je expliquer ça à une enfant aussi jeune ?
-Joy… Mamie n’est plus là. Elle… Elle est partie au ciel.
-Elle revient quand Mamie ? Pourquoi Mamie Partie ?
-Elle ne reviendra pas ma puce. Quand on part au ciel… On.. On ne peut pas revenir. Un jour, on finit tous par partir là-haut… Ai-je tenté de lui expliquer, maladroitement.

-Non ! Pas d’accord ! Je veux Mamie ! A-t-elle commencé à pleurer. Elle a tapé du pied et elle criait plus fort. Comme un caprice dont elle n’obtiendra jamais satisfaction.
-Cela fait partie de la vie ma puce… Mais, même si elle n’est plus parmi nous, Mamie sera toujours dans ton cœur, là. Essayais-je de la consoler, tout en posant doucement un doigt sur sa poitrine. Et au ciel, elle veillera toujours sur toi. Elle t’aimait beaucoup, tu sais.
-Je veux Mamie ! Je veux ma Mamie ! Continuait-elle à persister, s’en-tétant à demander sa grand-mère. J’étais complètement perdue, dépassée. Elle ne comprenait pas ce qui se passait. Elle est trop jeune pour comprendre…

Alors, je l’ai prise dans mes bras. J’ai serré son tout petit corps contre le mien, espérant sincèrement pouvoir consoler son chagrin. Je ne suis pas la meilleure mère du monde, mais je n’aime pas la voir aussi triste. J’ai donc essayé du mieux que j’ai pu d’apaiser sa tristesse.
Elle s’est laissée faire, mais elle continuait de pleurer. Je l’ai gardé contre moi, me sentant étrangement mieux, moi aussi. Comme si prendre ma fille dans mes bras me rappelait que je ne suis pas toute seule dans cette épreuve. Ma mère est partie, mais j’ai toujours ma fille, qui compte sur moi pour continuer à veiller sur elle.
-Maman est là ma puce, Maman est là…

En repensant à ces derniers jours, je ne peux m’empêcher de pleurer. Je suis dans le caveau avec mon père. Nous nous recueillons devant l’urne de Maman, sans oser partir d’ici. Partir serait lui dire adieu. Et c’est beaucoup trop dur. J’aimerai être forte pour soutenir Papa, mais je n’y arrive pas. D’autant plus que je suis toute seule.
Ryan a pourtant dit qu’il viendrait, mais je crois qu’il a eu des problèmes avec ses triplés à gérer. Papa m’a dit qu’il aurait un peu de retard et qu’il viendrait se recueillir dès qu’il pourrait. Personnellement, je pense plutôt qu’il veut être sûr de ne pas me croiser…
Quant à Roxane, Papa m’a dit qu’elle était dévastée, au téléphone. D’autant plus qu’elle était en tournée à l’autre bout du monde. Organiser son départ précipitée a été compliqué et à cela s’ajoute des grèves à l’aéroport et le temps de trajet… Du coup, elle n’est pas là aujourd’hui. Elle sera dans deux jours pour venir dire au revoir à Maman.

-Ma chérie, calme-toi… Ta mère ne voudrait pas que tu sois si triste. Me sort soudainement de mes pensées mon père. Je n’ai pas remarqué qu’il s’est tourné vers moi. Il me prend par les épaules, prenant sur lui pour me consoler.
-Je sais… Mais c’est tellement dur… Lui réponds-je dans un souffle.
-J’en ai conscience ma chérie, mais tu es forte. Tu surmonteras cette épreuve et ta mère voudrait que tu continues à vivre ta vie. Ce serait le plus bel hommage que tu pourrais lui faire.
-Je me sens minable Papa… Lui avoué-je d’une petite voix. J’aimerai être plus forte pour pouvoir t’aider …
-Oh ma puce, pense un peu à toi avant de penser à ton vieux père. Tente-t-il de me rassurer. Avec ta mère, nous nous sommes préparés à ça, nous savions que cela allait arriver un jour. C’est dur pour moi de la laisser partir, mais je m’y suis préparé. Je reste ton père, c’est à moi de sécher tes larmes, pas l’inverse.

Suite à ses mots, il me prend dans ses bras. Je m’y sens si bien. Cela me rappelle des souvenirs, quand il essayait de me rassurer après que j’ai fait un cauchemar. J’ai l’impression que plus rien ne peut m’arriver tant qu’il est là, toujours prêt à veiller sur sa fille.
Et cela me rappelle que même si ma mère n’est plus là, j’ai toujours mon père. Et que je dois profiter de chaque instant, tant qu’il est toujours là.
-Aller, rentrons. Finit-il par me dire. Il faut libérer ton amie, euh…
-Caroline. Lui rappelé-je doucement. En effet, Caroline s’est gentiment proposée de garder Joy, le temps qu’il fallait pour la cérémonie. Je lui en suis infiniment reconnaissance pour sa proposition, alors qu’elle aussi, vit un moment difficile…

Nous sortons donc du caveau avec Papa. Aujourd’hui est une belle journée d’automne. Le cimetière est calme et presque chaleureux avec les feuilles orangées qui jonchent le sol. Ma mère ne pouvait espérer de plus bel endroit pour reposer pour l’éternité.
Nous nous avançons tranquillement dans les allées et au moment de passer la grille, je remarque la présence de mon frère à l’entrée du cimetière. Il est là, devant, sans bouger, comme s’il n’osait pas bouger… A moins qu’il nous attendait.

-Bonjour mon grand. Va aussitôt à sa rencontre mon père. Il s’approche de Ryan et le serre dans ses bras. Comment tu te sens ?
-Je fais aller… Soupire-t-il en réponse. Au son de sa voix, je devine qu’il cherche lui aussi à faire des efforts pour ne rien laisser paraître.
-Et tes enfants ?
-Ils… Ils sont tristes d’avoir perdu leur grand-mère. Et je crois qu’ils comprennent pas trop non plus. C’est la première fois qu’ils sont confrontés à la mort.
-Les enfants sont plein de ressources tu sais, ils finiront par aller mieux avec le temps…

Je n’interviens pas dans leurs échanges. Je reste en retrait, attendant patiemment le moment de rentrer à la maison. Ryan se libère de l’étreinte de Papa et je vois son regard se poser sur moi. Son visage témoigne de la tristesse qu’il doit ressentir. D’autant plus que lui aussi, a du apprendre le décès de son géniteur, Don Lothario…
Quand j’ai appelé Caroline pour lui annoncer le décès de ma mère et chercher un peu de soutien de ma meilleure amie, elle était chez ses parents. Je l’ai entendu parler avec eux, et leur expliquer la situation avant de partir de chez eux pour venir me voir en vitesse. Le lendemain, c’est elle qui m’a appelé, pour m’annoncer le décès de son père.
Est-ce une coïncidence ou n’a-t-il pas supporté d’apprendre le décès de ma mère, avec qui il a eu une histoire ? Personne ne pourra jamais le dire à présent… En tout cas, je sais que j’en ai parlé à mon père, et il a certainement du avertir les jumeaux… Je n’ose pas imaginer ce que ça doit être, d’apprendre que son géniteur est décédé, bien qu’il n’ait jamais cherché à connaitre ses enfants de l’ombre.
-Bonjour, Rosie. Me salut subitement Ryan, me faisant sursauter. S’adresse-t-il vraiment à moi ? En m’appelant « Rosie », chose qu’il ne fait plus depuis des années ? Tu as une minute ? J’aimerai te parler…
-Je vous laisse. Intervient alors mon père, pour nous laisser tous les deux. Je vais aller m’occuper de Joy. Ryan, si tu veux passer, la porte est ouverte….

-Qu’est-ce que tu veux ? Lui demandé-je alors après que mon père soit parti. Je demande cela sans aucune animosité. Je suis trop triste pour avoir la force d’attaquer sans chercher à comprendre. Je n’en ai pas la force… Même si je suis lasse de l’entendre se justifier de ses agissements, je n’ai pas le courage de l’envoyer sur les roses.
-Je voudrai m’excuser. M’avoue-t-il sans aucune hésitation.
-T’excuser ? M’étonné-je alors, vraiment surprise.

-Oui, m’excuser de mon comportement envers toi. Confirme-t-il alors qu’il me semble si fatigué et dépité tout d’un coup. J’ai beaucoup réfléchi, depuis la mort de maman… Non, en vérité, ça fait un moment que j’y réfléchis. Rectifie-t-il après une minute de réflexion. Depuis que mes enfants ont grandi en fait… Je me suis rendu compte que j’ai été injuste avec toi.
-Comment ça ? Ne compris-je pas, un peu perdue par ses propos décousus. Que viennent faire ses enfants dans cette histoire ?
-Quand je vois mes enfants aussi proches les uns des autres, m’explique-t-il, ça me rappelle nous, quand nous étions enfants. Et ça me montre la relation que nous aurions pu avoir, si nous n’avions pas laissé la jalousie de Roxane contrôler nos vies… Enfin, je n’avais pas laissé sa jalousie me contrôler. Je me rends compte que j’ai été stupide et que te laisser de côté pour préserver Roxane, c’était du n’importe quoi. Et avec la mort de Maman, je me rends encore plus compte que c’était n’importe quoi. A cause de ma bêtise, je t’ai laissé toute seule durant tout ce temps… Alors que tu avais besoin d’aide… Et je le regrette profondément. Finit-il par me dire, sa voix se brisant sur la fin de sa tirade.

J’ai du mal à en croire mes oreilles. Mon frère revient vers moi après toutes ces années, exprimant des remords ? J’en ai tellement rêvé, il fut un temps. Mais aujourd’hui, je n’espérais même plus d’excuses. J’ai appris à vivre sans lui, sans mon frère. J’ai appris à vivre avec ma rancœur.
-Ryan, est-ce qu’au moins tu as conscience du mal que tu m’as fait, quand tu m’as laissé tomber ? Moi ? Ta sœur ? Alors que je n’ai jamais rien fait pour mériter ça …
-J’en ai conscience Rosie, et crois-moi, je le regrette. Soupire-t-il. Si je pouvais revenir en arrière et corriger mes erreurs, je le ferai sans hésiter. Je suis tellement désolé, Rosie… J’ai été bête, et je me sens d’autant plus con de ne pas avoir réagi plus tôt, quant tu allais mal après le départ de ton petit-ami et la naissance de ta fille… Ajoute-t-il, me faisant comprendre qu’il est au courant de toute ma vie. Sans surprise, les parents lui ont sans doute donné de mes nouvelles alors que je refusais de lui parler. J’aurais du être là, pour toi… J’ai parfaitement conscience de ce que je pourrai dire ou faire ne pourra changer ça…. Mais j’aimerai faire partie de ta vie. J’aimerai pouvoir connaître ma nièce, et qu’elle puisse connaître ses cousins. Et que toi aussi, tu puisses être vraiment une tante pour tes neveux et nièce.
-Ils… Ils ont du bien grandir, depuis le temps. Me contenté-je de lui dire, après un silence. Je lui fais un timide sourire, incapable de dire autre chose. Au final, je me rends compte que tout ce que j’ai attendu de lui depuis tout ce temps, ce sont des excuses. Même s’il va me falloir un peu de temps pour lui pardonner complètement, je n’ai pas envie de le tenir à l’écart de ma vie éternellement.
-Oh oui. Ce sont des vrais terreurs, à l’école. J’ai plein de photos d’eux, sur mon téléphone, si tu veux les voir…

Je lui souris, en hochant la tête. Il sort son téléphone de son manteau et me montre des photos de ses enfants. Ils sont vraiment adorables, tous les trois. Les garçons ressemblent à leur mère, alors que Sarah est vraiment une Opaline, à ne pas en douter. La tension semble retomber, et je dois avouer que cela me fait du bien. J’ai perdu ma mère mais aujourd’hui, j’ai retrouvé mon frère. De là où elle est, je suis certaine que Maman doit être la plus heureuse des mères de nous avoir ainsi.
-Cela m’a fait plaisir de te voir, Rosie. M’avoue Ryan tout en me prenant dans ses bras. Je suis un peu mal à l’aise face à ce geste auquel je ne m’attendais pas, mais je me détends en quelques secondes. Cela me fait du bien, d’être à nouveau proche de mon grand-frère.
-A moi aussi. Il faudra que tu passes à la maison, pour voir Joy. Tu verras, elle est adorable.
-Je n’en doute pas et ça sera avec plaisir.

Génération Rose – Génération 2 – Chapitre 11

Aujourd’hui, c’est la Fête des Récoltes. Nous avons fait ça en toute simplicité, tous ensemble… Ou presque. Les jumeaux sont absents. Ryan célèbre cette fête dans la famille de Juliette et Roxane est en tournée avec son orchestre à l’autre bout du monde. Personnellement, cela ne me fait pas grand chose mais je vois bien que c’est plus compliqué pour mes parents. Ils font bonne figure, mais je vois dans leur regard que cela les attriste.
Je réalise que cela fait un moment que je ne les ai pas vu. Ils me manquent, un peu, mais j’ai appris à vivre sans eux. Ils restent dans leur coin, font leur petite vie et vu leur attitude à mon égard, c’est peut-être mieux comme ça. Même si, au fond, j’aurais préféré que notre relation soit toute autre et qu’on puisse être tous ensemble pendant les fêtes.
Mais je ne me laisse pas miner le moral et je profite de cette journée avec mes parents et ma fille.

Cette année, Papa a préparé une dinde végétarienne merveilleuse. Et, pour sa première Fête des Récoltes, Joy profite également de la nourriture végétarienne…. Mais pas forcément de la manière que l’on imagine.
En effet, elle passe plus de temps à jouer avec sa nourriture qu’à la manger. Je soupire en la voyant faire car elle en met partout. Mais je ne sais pas trop comment réagir vis-à-vis d’elle… Je m’occupe tellement peu d’elle que j’ai peur de lui demander d’arrêter… Je n’ai pas envie qu’elle se mette à penser que je m’intéresse à elle seulement lorsqu’elle fait des bêtises…
-Joy, mange proprement s’il te plait. Finit par intervenir mon père, alors que ma fille lui offre son plus sourire innocent.
Comme si elle est un ange, ne faisant jamais de bêtise. Comme si on pouvait y croire !

Après le repas, mon père s’empresse d’aller libérer Joy de sa chaise haute. Alors qu’elle pense sans doute pouvoir vadrouiller à sa guise, mon père la récupère aussitôt sur son dos pour commencer à jouer avec elle. Les voilà qu’ils font l’avion !
-Hey Miss Joy ! Bienvenue sur la compagnie Opaline Air Lines et c’est partie vers votre voyage au pays des jeux ! Wrrrrrroooooooummmm !!!! Commence-t-il à s’exclamer, faisant rire aux éclats ma fille qui tend elle-aussi les bras, prête à s’envoler.
Je vois ma mère leur lancer un regard amusé et attendri. Je ne peux qu’avouer que les voir ainsi, aussi proche, me touche également. Leur relation est tellement belle et Joy a de la chance d’avoir ses grands-parents, et qu’ils soient aussi merveilleux. Je suis presque sûre qu’elle ne serait pas aussi souriante si elle m’avait juste eu moi….
Je secoue la tête, chassant mes pensées négatives habituelles. Je dois arrêter de me prendre la tête et profiter de l’instant présent si je veux pouvoir avancer. Ressasser sans cesse la même chose n’est bon ni pour moi, ni pour elle.

Après avoir fait un tour de la table avec Joy sur son dos à faire l’avion, mon père s’empresse de la reprendre dans ses bras pour être certain qu’elle ne tombe pas. Il faut dire qu’elle commençait à glisser et que mon père n’est plus tout jeune … Supporter une petite fille sur son dos ne doit pas être évident.
Mais cela ne veut pas dire qu’il a fini de jouer avec elle. Bien au contraire ! Il s’amuse à la faire tourner dans les sens, si bien qu’elle finit même par avoir la tête à l’envers.
-Wrrrouuuummmm ! Attention turbulences ! Accrochez vos ceintures ! Nous allons faire des loopings !! Continue-t-il sur la même lancée. Loin d’être effrayée, Joy continue de rire sans s’arrêter. Elle se prête au jeu sans le moindre problème et j’avoue que son rire sonne comme une douce mélodie dans mes oreilles.
Même si je ne le montre pas forcément, je suis ravie de voir ma fille heureuse. J’espère qu’un jour, je serai capable de la faire rire autant que mon père.

Après ce moment jeu entre Papy et petite-fille, c’est l’heure de la sieste. Cette fois-ci, c’est ma mère qui se charge d’emmener Joy dans sa chambre pour lui lire un histoire. Elle râle aussitôt quand ma mère lui annonce qu’il est temps pour elle d’aller dormir un peu…

Mais elle se calme rapidement quand ma mère lui promet de lui lire son histoire préférée : « Wouf va dans l’espace » ! Je crois que ma mère lui a un peu trop monté la tête avec ses histoires d’extraterrestre… Mais cela fait plaisir à Joy d’écouter ses histoires alors, pourquoi pas après tout… Tant qu’elle ne finit pas traumatisée.

Décidant de profiter du calme de la maison, je vais dans ma chambre pour me changer. Je veux entretenir ma ligne et pour cela, je n’ai pas d’autres choix que de faire du sport. Il fait encore relativement bon pour la saison, alors je vais profiter de l’extérieur et des couleurs automnales en allant faire un footing. Lorsque j’ai mis le nez dehors, j’ai vu que mon père est en train de ratisser les feuilles mortes. Maniaque comme il est, il ne doit pas supporter que le jardin soit en désordre.
-Tu n’as pas froid comme ça ? S’étonne-t-il en me voyant passer devant lui, vêtue d’un short, d’une brassière et d’un gilet sans manche.
-Du tout ! Et je vais me réchauffer en courant ! Bon courage avec tes feuilles !

Mais cette nuit, il se passe quelque chose d’étrange. Il fait nuit noir dehors, tout le monde dort. Mais soudain, je suis réveillée par une forte lumière blanche, provenant de l’extérieur. Je me frotte les yeux, aveuglée par cette lumière indésirable. Puis, je me mets à genoux sur mon lit pour regarder ce qu’il se passe par la fenêtre. Et là, je suis surprise de constater que ma mère est dehors ! Mais que fait-elle là ?

Mon cœur bat à une vitesse folle, stressée de savoir ma mère dehors avec cette lumière étrange et inconnue… Et je manque d’hurler lorsque je constate que ma mère est comme aspirée par cette lumière ! Je la vois s’envoler dans les airs … pour… disparaître … dans… une soucoupe volante ! Je n’y crois pas mes yeux ! Je me pince le bras pour être sûre de ne pas rêver avant de foncer voir mon père dans sa chambre.
-Oh c’est rien ! Les aliens sont juste venus la chercher pour lui parler. Ca arrive de temps en temps. Ils m’ont même enlevé une fois. Mais t’inquiète pas, elle va revenir dans deux ou trois heures. Retourne dormir. M’assure mon père en bâillant lorsque je l’ai réveillé pour l’avertir de ce que je viens de voir.
Je suis éberluée par ce qu’il me dit, avec une telle désinvolture. Visiblement, il a l’habitude de voir ma mère disparaître au beau milieu de la nuit et ne semble pas être plus inquiet que ça.
Personnellement, je ne suis rassurée et je n’arrive pas à me rendormir… Jusqu’à ce que j’aperçoive à nouveau la même lumière, et que je vois ma mère rentrer tranquillement à la maison, comme si de rien n’était.
Bon, visiblement, il n’y a pas de quoi s’inquiéter.

Le lendemain matin, je ne suis pas très réveillée. Je maudis ma mauvaise nuit ! Mes yeux ne sont pas en face des trous qu’au lieu de prendre un reste de toasts avec des œufs, j’ai pris les restes de dinde de la veille…
Maudits soient les aliens !

-Alors, tu t’es remise de tes émotions ? Me taquine mon père en venant me rejoindre. Lui, contrairement à moi, est en pleine forme. Je l’envie tellement !
-Ouais… Mais je suis crevée… Soupiré-je en réponse avant de regarder bizarrement le contenu de mon assiette. La dinde au tofu au petit déjeuner, ce n’est pas terrible. Testée et non approuvée. Ca te fait rien que Maman se fasse enlever par les aliens comme ça ?
-La première fois, cela m’a fait bizarre, comme toi cette nuit. M’avoue-t-il avec honnêteté. Mais ta mère m’a expliqué la situation, et à force, j’ai fini par m’y habituer. Le plus dur a été quand j’ai été enlevé à mon tour ! Là, pour le coup, je m’y attendais pas !
-Brrr ! J’espère qu’ils vont nous laisser tranquille avec Joy ! J’ai pas envie d’être la cible de…

*BOUM*

-Papa ? C’était quoi ce bruit ? M’inquiété-je subitement, alors que mon père scrute le baby phone.
-Ca ne vient pas de la chambre de ta fille en tout cas… Souffle-t-il, alors qu’un mauvais pressentiment m’assaille subitement. Je ne le sens pas du tout, ce coup-là.
-Je… Je vais aller voir… Lui signalé-je, sans savoir ce qui m’attendait au même moment, à l’étage…

Je monte les escaliers d’un pas lent. J’ai peur de découvrir ce qui se passe. Mon cœur se serre au fur et à mesure que j’avance. Pour me rassurer, je vais dans la chambre de Joy dans un premier temps. Elle dort calmement dans son lit, loin de se préoccuper de ce qui se passe. Je vais dans la salle de bain, personne. J’ai du mal à respirer. Terrifiée, je m’avance vers la chambre de mes parents. Ma main tremble lorsqu’elle s’approche de la poignée, et la porte semble peser une tonne au moment où je l’ouvre.
-MAMAN ! Ne puis-je m’empêcher d’hurler.

Je n’arrive pas à y croire. Je ne veux pas voir ça. Mais je suis pétrifiée, et incapable de bouger.
Devant moi, je découvre le corps sans vie de ma mère étendue sur le sol. Je le devine aisément, je ne la vois pas respirer.
Non… Non ce n’est pas possible … Pas maintenant. Je ne suis pas prête… J’ai encore besoin d’elle… Elle ne peut pas partir maintenant …..
Maman, reste avec moi… J’ai besoin de toi…

-Rosie ? Qu’est-ce qui … Commence mon père, essoufflé, avant de stopper de lui-même sa phrase.
En m’entendant hurler, il a du courir les escaliers pour me rejoindre. Mais comme moi, en entrant dans la chambre, il se fige. Je devine qu’il est aussi choqué que moi par la scène qui s’offre à nous.
-Papa… C’est pas possible … Maman ne peut pas… Soufflé-je, ne voulant pas y croire. Je ne peux pas perdre ma maman… Pas maintenant…
-Je.. Je suis désolé ma puce… Bredouille-t-il simplement, comme s’il était dans un état second.

Mon père reste ainsi pendant un temps, les yeux rivés sur ma mère. Et soudain, il explose. Il pleure, réalise qu’il est en train de perdre sa femme et que nous ne pouvons rien y faire.
Je crois que c’est la première fois que je vois mon père pleurer… Mon cœur se serre, tandis que je suis incapable de manifester aucune émotion. Je ne réalise pas. Je ne veux pas y croire. Peut-être que si je refuse l’idée suffisamment fort, ma mère restera parmi nous ?
Comme pour anéantir mes espoirs, un froid glacial entre dans la pièce. Une forme sombre et terrifiante se manifeste justement devant nous. Je sors brusquement de ma léthargie en la voyant. Je sursaute de frayeur. Qu’est-ce que c’est que ce truc ?

Puis, je réalise. J’ai déjà vu cette créature, une fois. C’était au mariage de mes parents. Elle était venue emporter Charlotte.
Je me fige une nouvelle fois, réalisant ce que ça signifie. Elle vient chercher ma mère.
Ma mère…
Maman…
Non … Non … Non non non non !
Aussitôt, je fonds en larmes, alors que la Faucheuse s’empare de l’esprit de ma mère…

… Il ne reste plus de son passage qu’une urne dorée, enfermant les restes de ma mère.
Je tombe à genoux sur le sol à l’instant où la Faucheuse disparaît, après qu’elle ait jeté un regard sur mon père. Comme si elle lui disait qu’elle allait bientôt revenir.
Je pleure, et je tente de me consoler en me disant que ma fille n’a pas assisté à ce terrible spectacle, protégée par les bras de Morphée….

….

Oh non Joy… Comment vais-je pouvoir lui annoncer ça ?

Génération Rose – Génération 2 – Chapitre 10

Après ma réunion à l’association, j’ai décidé d’aller me détendre dans un bar. Ce n’est pas forcément une sage décision mais je n’ai aucune envie de rentrer à la maison. Qui sait ce que ma mère a bien pu trouver comme idée pour tenter de me rapprocher de ma fille…
Je soupire en attendant mon verre. Je sais qu’elle veut bien faire. Elle ne veut que mon bonheur et que j’aille de l’avant… Et que je surmonte mon blocage vis-à-vis de ma fille.
Mais pour le moment, je n’y arrive pas. C’est plus fort que moi.
Alors, je fuis.

Je soupire une nouvelle fois en récupérant mon verre. Je me donnerais des baffes parfois. Non, même tout le temps. Je ne suis pas possible d’agir et de réagir ainsi. Je devrais grandir un peu et assumer mes responsabilités. Mes parents ne m’ont pas élevée ainsi, j’en ai bien conscience. Et j’ai une chance inestimables de les avoir à mes côtés pour m’aider.
Mais lorsque je suis devant Joy, toutes mes bonnes résolutions s’envolent et je me retrouve paralysée devant elle. J’ignore pourquoi je réagis ainsi, d’où peut venir ce blocage. Si seulement je pouvais trouver la solution…
Soudain, je sens mon téléphone vibrer dans ma poche. Je m’empresse de le prendre pour regarder mon message.
Un SMS de Caroline, qui me propose de venir la rejoindre chez elle… A San Myshuno. Je souris et j’accepte aussitôt.

Il me faut un peu de temps pour arriver là-bas par les transports en commun, et j’en profite pour prévenir ma mère que je rentrerai plus tard que prévu. Elle ne trouve pas d’objection à me dire. Après tout, Caroline est toute fière de son premier appartement et c’est normal qu’elle m’invite chez elle pour me le montrer.
En arrivant dans le quartier de la mode, je suis saisis par les différences avec le quartier des Épices, dans lequel je passe le plus clair de mon temps. C’est un charme différent.
Je ne tarde pas à sonner à l’interphone et j’entre dans l’immeuble. Arrivée au bon étage, je découvre que Caroline m’attend dans le couloir lorsque je sors de l’ascenseur.
-Hey ! Je suis contente que tu ais pu venir ! S’exclame-t-elle joyeusement, affichant un grand sourire radieux.
-Je n’aurais refusé l’invitation pour rien au monde ! Depuis le temps que tu voulais déménager !
-C’est clair ! Bon, tu verras, ce n’est pas gigantesque mais cela suffit amplement ! M’annonce-t-elle avant de me conduire jusqu’à son appartement.

L’appartement n’est, en effet, pas immense et cela doit lui changer de sa villa à Oasis Springs. Mais il y a largement ce qu’il faut pour y vivre correctement. Un salon avec une cuisine ouverte, une petite salle de bain, une chambre et un bureau. La décoration est plutôt moderne et on voit qu’elle a mis du soin dans l’ameublement.
Caroline rayonne. Je ne l’ai jamais vu comme ça je crois. Depuis qu’elle a intégré l’association, je l’ai vu changer du tout au tout, comme si elle s’est révélée à elle-même. Elle a gagné en assurance et en confiance en elle. Elle a même opté pour un changement de look, plus adulte, et je dois avouer que cela lui va bien.
Après avoir fait le tour de son appartement, nous nous sommes installées sur le canapé pour papoter et jouer aux jeux vidéos. Je ne suis pas une experte mais c’est toujours un plaisir de passer du temps avec ma meilleure amie.

-Je t’ai battu ! Se vante-t-elle d’ailleurs, un peu plus tard.
-En même temps, ce n’est pas bien compliqué ! Ne puis-je m’empêcher de rire à mon tour.
-Tu veux rester dîner ? J’ai de quoi faire dans le frigo ! Et… Y’a Manon qui doit passer ce soir aussi. Ah et il faut que je te montre les photos que m’a envoyé Paul ! Qu’est-ce que c’est beau Selvadorada ! Et sa copine ! Elle est adorable ! J’ai parlé avec elle sur Skype ! Enfin j’ai essayé car mon espagnol est un peu rouillé ! S’exclame Caroline à vive allure, si bien que j’ai du mal à suivre.
-Désolée, je ne peux pas, il va falloir que je rentre, mais c’est gentil. Vous vous entendez bien avec Manon dis donc. J’ai l’impression que vous passez pas mal de temps ensemble. Relevé-je, intriguée, passant le fait que Paul donne régulièrement des nouvelles à sa sœur. C’est une chose normale mais je suis un peu déçue. Il faut dire qu’il n’est pas très loquace avec moi, lorsqu’il me donne de ses nouvelles. Il m’a brièvement dit qu’il a une copine, en effet, mais il ne m’en a pas dit plus.

-Eh bien, elle est gentille, c’est tout ! Et puis, on se connait depuis le lycée, donc c’est facile de bien s’entendre ! Se contente-t-elle de me répondre, bien que je perçois un léger rougissement sur ses joues.
-Ho ho ! Y’a anguille sous roche dis moi !! M’empressé-je de la taquiner, mais ravie pour elle. Surtout si leur relation s’est concrétisée.
-Il y a rien sous roche, tu racontes n’importe quoi ! On est juste amie ! Se défend-t-elle aussitôt.
-Alors pourquoi tu rougis ? Relevé-je avec un sourire taquin, alors qu’elle me balance un coussin en plein visage.
-Comment va ta fille au fait ? Elle a du bien grandir ! Je suis sûre qu’elle est craquante !
-Elle va bien. Elle ressemble beaucoup à son père… Soufflé-je, perdant un peu de ma bonne humeur.
-Tu… Tu es sûre que tu ne veux toujours pas parler de Joy à Sven ? Me demande alors Caroline après un silence entre nous, légèrement inquiète pour moi. Ca t’aiderait peut-être de savoir qu’il est au courant, qu’il n’y a plus de secret entre vous.
-Après tout ce temps ? Soupiré-je, dépitée. Non, c’est trop tard. Il a sa propre vie maintenant. Je n’ai pas envie de revenir et de tout gâcher….
-Il n’est jamais trop tard, tu sais ?

Un peu ailleurs, je finis par laisser Caroline pour rentrer chez moi. Il commence à faire nuit et j’aimerai éviter de rentrer trop tard.
J’ai eu l’esprit dans le vague, sur le trajet retour vers Willow Creek. Et si j’étais plus perturbée que je veux bien l’admettre sur l’absence de Sven dans la vie de Joy ? Si mon choix de le laisser dans l’ignorance, sans savoir comment il réagirait à l’annonce qu’il a une fille, avait un impact sur ma relation actuelle avec ma fille ?
Je suis incapable de le dire, d’autant plus que je suis toujours convaincue d’avoir fait le bon choix. Et puis… Sven vivant en Suède, même s’il était au courant, il ne pourrait pas être présent dans la vie de sa fille. Comment agir comme un père quand on vit à des milliers de kilomètres ?

-Tu vas bien ma chérie ? Me demande ma mère en s’installant à table avec moi. Tu es ailleurs depuis que tu es rentrée. Ca s’est mal passée ta réunion ?

-Ca a été, comme d’hab. Je suis juste un peu fatiguée. Lui dis-je en réponse. D’autant plus que j’ai fait un détour avant de rentrer du coup.
-Ah oui, et comment va Caroline d’ailleurs ?
-Elle va bien. Son appart’ est chouette d’ailleurs. Soufflé-je, n’osant avouer le fond de ma pensée. Car l’appartement de ma meilleure, c’est le genre d’appart’ que j’aurais aimé avoir… Si je n’avais pas eu Joy. Si j’avais pu partir de chez mes parents et profiter de mon indépendance.
Mais aujourd’hui, c’est impossible, car il faut bien admettre que je serai incapable de m’occuper de Joy toute seule et je ne peux décemment pas l’abandonner chez mes parents.

-Où est Papa ? Demandé-je soudain, pour changer de sujet.
-En haut, en train de s’occuper de Joy.
-Elle a été sage aujourd’hui ?
-Très, un vrai petit ange. Me confirme ma mère avec une pointe de fierté dans la voix.

A la fin du repas, je décide donc de monter pour rejoindre mon père et ma fille. Il faut que je fasse des efforts, pour elle. Elle me rappelle beaucoup son père, certes, mais elle est aussi la seule chose qui me reste de lui. Alors, même si je me sens pas capable de m’occuper d’elle, cela ne veut pas dire que je dois être absente de sa vie.
-Ca va Papa ? Lui demandé-je en entrant dans la salle de bain, tandis qu’il essaie d’apprendre l’air de l’utilisation du pot à Joy.
-Ca va, ça va. J’attends que Joy comprenne qu’elle doit faire popo dans son pot mais elle n’a pas l’air décidé pour le moment. Qu’est-ce que tu fais avec ton assiette dans la main ?
-Je voulais venir te voir alors autant la laver ici. Haussé-je les épaules comme si la réponse est évidente. Elle n’a peut-être pas envie ?
-J’ai un gros doute, vu comment elle se tortille dans tous les sens !

Je ne peux m’empêcher de sourire à cette réflexion, essayant d’imaginer Joy en situation. Et puis, quand je la regarde sur son pot, je ne peux m’empêcher de rire.
-Qu’est-ce qui te fait rire ? Me demande mon père, visiblement étonné.
-Sa tête ! Elle fait preuve d’une intense concentration ! Lui signalé-je, pour qu’il observe à son tour la bouille de sa petite-fille.
Yeux plissés, sourcils froncés, lèvres pincées, Joy semble effectivement très concentrée sur sa tâche. Mon père ricane à son tour, tout en étant attendri par la bouille de Joy.
-Pas drôle ! Pas zenti ! Boude-t-elle d’ailleurs, comprenant être la source de nos rires.

Après que Joy daigne enfin faire « popo » dans son pot, comme dirait mon père, elle commence à manifester son petit caractère. Tandis que mon père la rhabille, cette dernière continue de gesticuler dans tous les sens. Et le pire vient quand il annonce qu’il est l’heure d’aller dormir…
-Non ! Ze veux jouer ! Exige Joy en pleurant de chaudes larmes de crocodile. En l’entendant crier ainsi, je ne peux m’empêcher de grimacer. Mes pauvres oreilles…
-Non Joy, il est l’heure de dormir ! Tu es fatiguée ça se voit ! Se montre ferme mon père, loin de se laisser impressionné par un bambin en crise. Il faut dire qu’il en a vu d’autres.
-Zouzou !
-Non Joy ! Je te mets en pyjama, et au lit ! Je te raconterai une histoire, mais seulement si tu te calmes !
-….Doudou ? Marmonne-t-elle d’une petite voix implorante après un silence, tout en lançant un regard digne du Chat Potté à son grand-père.
-Oui, je vais te donner ton doudou. Aller, au dodo !

Le lendemain, j’ai du partir tôt au travail. En plus, j’ai du filer précipitamment, n’étant pas en avance pour me rendre à San Myshuno.
Néanmoins, en partant, je surprends une conversation entre mes parents. Ils sont tous les deux installés sur le canapé à regarder la télé, le baby phone posé non loin pour guetter le réveil de Joy. Et apparemment, je suis le centre de leur conversation.

-Nick, tu crois qu’elle va finir par y arriver ? Semble s’inquiéter ma mère.
-J’en suis convaincu. Essaie-t-il de la rassurer. Regarde, elle ne sort plus systématiquement de la pièce quand il y a Joy. Elle observe juste, certes, mais c’est déjà un début…
-C’est sûr qu’avant, elle ne pouvait pas regarder sa fille plus de 5 minutes. Soupire ma mère. Mais j’ai tellement peur qu’elle regrette plus tard, de ne pas avoir profité de ces moments-là avec sa fille. Et puis, nous ne sommes pas éternels, que se passera-t-il quand…
-Ne t’inquiète pas. Rosie est forte, elle saura gérer quand le moment sera venu. Reste confiant mon père alors que mon cœur se serre. Il est vrai que j’ai tendance à oublier qu’un jour, mes parents ne seront plus là. Cette idée m’est insupportable, inconcevable. Ils ont toujours fait partie de ma vie, et c’est comme s’ils étaient immortels dans mon esprit. Mais que ferai-je, le jour où leur heure sera venue ?
Chassant cette idée de mon esprit, je ne tarde pas à sortir de la maison pour ne plus y penser.

-Ah, on dirait que Joy est réveillée ! Fini de manger tranquille, je m’en occupe ! S’exclame alors Maetha.
Laissant son époux finir de déjeuner sur le canapé, Maetha se rend rapidement à l’étage pour rejoindre la chambre de Joy. La fillette est tranquillement en train de jouer avec ses cubes en bois, s’amusant à faire des tours avec. En voyant sa grand-mère, elle affiche un grand sourire innocent.

-Eh bien ma puce, on dirait que tu es bien réveillée ! Aller, c’est l’heure du bain ma grande !
-Non ! Veux pas prendre de bain ! Proteste aussitôt Joy en secouant la tête de droite à gauche en affichant une moue boudeuse.
-Si si, au bain ! Sinon, Mamie va appeler les aliens ! Fait-elle mine de menacer. Aussitôt, les yeux de Joy s’arrondissent comme des soucoupes.
-Des a-li-ens ? S’exclame-t-elle en articulant chaque syllabe.
-Oui les aliens ! Et ils adorent les petites filles qui sentent mauvaises ! Et tu peux me croire, je les ai déjà vu !
-Bain ! Bain !
-J’aime mieux ça !

Maetha n’est pas forcément très fière d’utiliser ce subterfuge pour contraindre à sa petite fille à prendre son bain. Ce n’était pas la première fois qu’elle menaçait de faire venir les aliens et cela marche à tous les coups. Mais, Joy semble davantage fascinée que terrifiée. Elle pose, ou du moins essaie, plein de questions à sa grand-mère sur ces mystérieux aliens, venant d’un autre monde et adore l’entendre raconter ses histoires.
-Bouaaah ! Le méchant alien éponge vient t’attaquer ! S’exclame joyeusement Maetha en utilisant une voix grave tout en approchant l’éponge de Joy pour lui mettre de la mousse sur le bout du nez.
-Aaah ! Cana aide moi !! Se prête-t-elle au jeu en tendant son canard en plastique vers l’éponge maléfique.
-Canard ma puce, ca-nard. La corrige aussitôt Maetha. Les aliens ont besoin de précision pour avoir peur !
-Bouh ! Réplique alors Joy en éclaboussant sa grand-mère.

-Mamie, sont comment les a-li-ens ? L’interroge Joy après que Maetha l’ait sorti du bain et habillée d’une adorable petite robe jaune.
-Ils sont tout vert ! Ou tout bleu … Ca dépend desquels. Et ils vivent dans l’espace ! Mais ne t’inquiète pas, maintenant tu es toute propre, ils ne viendront pas te chercher ! Lui assure-t-elle avant de se pencher pour lui avouer, comme une confidence. Mais pour tout t’avouer, les aliens, ils ne sont pas si vilains que ça.
-Oooooh ! Gentil a-li-ens ?
-Oui, c’est ça, gentils !

Après ce bon bain, Joy se dépêche de retourner dans sa chambre pour profiter de sa maison de poupées. Et il ne faut pas très longtemps pour réclamer sa grand-mère, afin qu’elle vienne jouer avec elle.
Maetha ne se fait pas prier. Elle se dépêche de rejoindre sa petite-fille et s’installer avec elle sur le sol. Elle sait que ce n’est pas forcément une bonne idée, qu’elle aura beaucoup de mal à se relever au vue de son grand âge, mais ce n’est pas grave. Elle renoncerait pour rien au monde de jouer avec sa petite fille ! Et puis, Nick l’aidera à se relever ! Elle n’aura qu’à crier au secours !
-Mamie, a-li-ens ! S’exclame Joy en tendant une poupée à Maetha.
-C’est une alien ? D’accord ! Mouahahahahaha je viens conquérir le monde !!
-Non ! Gentil a-li-en !! Proteste aussitôt la fillette.
-Oups ! Pardon ! Hey coucou ! Je viens faire du tourisme ! Il y a quoi à visiter par ici ? Il y a du gloubi-boulga à manger ?
-Beeeeh non !! Grimace aussitôt Joy à l’entente de ce mot bizarre, faisant rire sa grand-mère, attendrie par sa frimousse et son petit nez froncé.

Génération Rose – Génération 2 – Chapitre 9

Joy devient ainsi une adorable bambine. Une petite blonde aux yeux bleus, comme son père. Des yeux vifs et pétillants, qui s’illumine en voyant sa grand-mère. Elle affiche un grand sourire et tend les bras vers elle.
-Mamie câlin ! Mamie câlin ! S’exclame-t-elle joyeusement en sautillant sur place.
-Tu veux un câlin ma puce ?
-Ouiiii !!

Maetha lui répond par un sourire tendre. Attendrie devant la bouille de sa petite-fille, elle se baisse aussitôt pour répondre à sa demande. Joy se jette dans ses bras pour lui offrir le plus adorable des câlins. Un vrai petit ange qui ferait fondre le plus dur des cœurs de pierre.

Joy est attentive et observe le monde qui l’entoure. Elle cherche quoi faire. Elle surveille sa grand-mère, s’assurant qu’elle ne s’en aille pas. La fillette reste calme et tranquille, devant encore s’habituer à son environnement. Elle qui n’a connu que son berceau se voit offrir un éventail de possibilité. Sa grand-mère lui sourit et lui montre les cubes, avec lesquels elle peut jouer. Joy affiche un grand sourire et s’empresse de s’asseoir pour s’amuser avec les cubes en bois.

Il commence à faire tard quand je rentre du travail. J’ai eu une journée de fou aujourd’hui. J’ai du accompagner mes collègues à la mairie pour soutenir notre demande de subventions et obtenir le soutien des élus locaux. J’ignore si nous les avons convaincu, mais en tout cas, ils avaient l’air intéressés.
Je cherche ma mère dans toute la maison et je finis par la trouver dans la chambre de Joy.
A peine entrée à l’intérieur de la pièce, je remarque qu’elle a grandi. C’est vrai que c’est son anniversaire aujourd’hui…
-Bonsoir vous deux… Balbutié-je timidement.
-Bonsoir ma fille. Me répond aussitôt ma mère. Tu as vu Joy ? Maman est rentrée !

Ma fille se tourne dans ma direction et me regarde. Aussitôt, l’évidence me frappe. Elle a un air indéniable avec son père. Aussi blonde que lui, de beaux yeux bleus comme les siens…
-C’est fou comme elle te ressemble au même âge ! Encore un petit clone Opaline ! S’en amuse ma mère.
Cependant, je ne remarque pas les ressemblances entre nous. Je ne vois que celles avec son père.
Je ne m’y attendais pas. La logique de la génétique voudrait qu’elle soit brune aux yeux marrons, comme moi… Mais le hasard a voulu me rappeler mes erreurs, mes étourderies et l’absence de Sven.

Mon cœur se serre à cette constatation. Néanmoins, j’essaie de ne rien laisser paraître. J’affiche un sourire de façade pour faire bonne figure devant ma fille. Mes problèmes ne doivent pas l’affecter, même si pour cela, je dois me montrer distante avec elle.
-Tu es adorable, Joy. Soufflé-je alors, un peu mal à l’aise. J’avoue que je me sens un peu bête et que je ne sais absolument pas quoi faire devant cette petite fille qui compte tellement sur moi. Je… Je vais aller me changer.

Aussitôt, je prends la poudre d’escampette. Je sors de la chambre de Joy pour me réfugier directement dans la mienne. On a fait plus mature comme comportement, mais j’ai envie d’être seule. Je devrais pourtant m’émerveiller devant la bouille adorable de ma fille mais c’est trop dur pour moi. Je vois Sven au travers du visage de Joy et cela me sert le cœur.
Alors que je pensais pouvoir être tranquille, j’entends ma porte s’ouvrir quelques secondes après que je l’ai fermé. Je me retourne et découvre que ma mère m’a suivi.
-Tout va bien Rosie ? Me demande-t-elle, visiblement inquiète.
-Oui Maman, pourquoi ? Je ne suis juste pas très à l’aise dans cette tenue, j’ai envie de mettre quelque chose de confortable. Me justifié-je alors, ne disant que la moitié de la vérité. Une moitié de vérité plus acceptable, socialement parlant.
-J’ai bien remarqué que tu as été troublée en voyant ta fille… Je me doute bien qu’elle ressemble à son père… Du coup, je ne peux m’empêcher de m’inquiéter pour toi …

-Ca va aller, ne t’en fais pas. Je ne suis pas obligée d’avoir un clone de moi-même comme enfant. Lui dis-je en me forçant à sourire. Son inquiétude me touche et elle a visé juste. Elle me connait par cœur mais j’ai trop honte pour oser avouer qu’elle a raison.
-Tu es sûre ? Tu arriveras à gérer sa ressemblance avec Sven ? Tente-t-elle de s’en assurer, suspicieuse. Je peux comprendre tu sais. J’ai vécu la même chose avec ta sœur … C’était pas évident au début mais…
-Maman. Ca va. Ne t’inquiète pas. J’ai juste envie de me changer et de me poser un peu. La journée a été longue. Soupiré-je en m’asseyant sur le bord du lit en me massant les tempes. Je sens un mal de tête arrivé et j’ai envie de ne penser à rien.

Bien que sceptique, ma mère finit par me laisser tranquille et m’accorder le répis dont j’ai besoin. Je suis dépitée par ma propre attitude. Je me donnerai des baffes tellement je fuis mes responsabilités. Mais c’est plus fort que moi, surtout maintenant qu’elle a grandi.
Alors, encore une fois, je me repose sur mes parents. Qu’est-ce que je ferai sans eux…
Tous les deux, ils sont ravis de s’occuper de leur petite-fille. Je les vois s’émerveiller devant sa bouille, ses grands yeux bleus et ses sourires. Ils répètent souvent qu’elle me ressemble. Moi, je ne vois que ses cheveux blonds et la couleur de ses yeux…

J’ai mal dormi toute la nuit. Je ne suis pas parvenue à me sortir Sven de l’esprit. Cela m’agace. Je sais que je ne le reverrais plus, que je n’aurais plus de contact avec lui… Il faut absolument que je parvienne à me le sortir de la tête. Sinon, je ne parviendrai jamais à avancer et à changer ce qui ne va pas dans ma vie…
Alors, un beau jour, sur un coup de tête, je vais dans un salon de tatouage. Le tatoueur me regarde avec un air sceptique mais il finit par accepter ma demande.
Me tatouer un cœur sur le bras, avec écrit Sven à l’intérieur, dans une langue étrangère. C’est terriblement cliché et sans doute difficile à porter sur la durée, mais c’est le seul moyen de me le sortir de la tête. Sven fera toujours parti de moi, et le graver à jamais dans ma peau est une manifestation symbolique de cette partie de ma vie. Ainsi, au lieu de l’avoir en permanence dans la tête, je l’aurais sur le bras.
-Tu t’es faite faire un tatouage ? S’étonne ma mère un matin, après que j’ai enfin pu retirer le pansement qui protégeait ma peau en cours de cicatrisation.
-Oui… J’en ai éprouvée le besoin…
-Le texte signifie quoi ?
-Sven… Soufflé-je d’un air songeur, sans oser regarder ma mère. Heureusement, elle s’abstient de faire un commentaire et se contente d’acquiescer.

Après le petit déjeuner, je file prendre ma douche pour me préparer avant d’aller travailler. J’ai une petite journée aujourd’hui mais je dois tout de même aller faire un tour à l’association pour une réunion.
En retournant dans le salon, je constate que Joy est réveillée et installée dans sa chaise haute. Je l’observe, mais je ne dis rien. Je suis comme bloquée, incapable de faire quoique ce soit.

-Tu as vu comme elle est mignonne Joy ? Me signale ma mère avec un grand sourire. Adorable dans son pyjama hamster.
-Oui.. Très…
-Tu peux lui parler tu sais. Elle est suffisamment grande pour commencer à te répondre.

Face à ma fille, je reste tétanisée. J’admets volontiers qu’elle est mignonne. Mais le reste, c’est encore trop dur pour moi. Je l’observe manger ses céréales mais je ne dis rien. J’ai l’air complètement idiote et par moment, Joy me lance des regards incrédules. Elle doit se demander ce que je trafique à rester plantée là, à la regarder sans rien dire.
-Elles… Elles étaient bonnes tes céréales ? Tenté-je finalement, lorsqu’elle a fini son petit déjeuner.
-Oui !
-Tu veux autre chose ?
-Non !

J’ai l’air ridicule. C’est ma fille et je suis incapable de lui parler normalement. Je suis sûre qu’elle comprend que je me force. Cela se voit dans son regard. Elle me scrute bizarrement.
Je suis terriblement mal à l’aise en présence de ma fille. Je suis certainement qu’elle doit le ressentir. Elle doit se demander ce que je fais là, moi, à quoi je sers dans cette maison. Elle a sa mamie, son papy, et une dame qui traîne de temps en temps à la maison sans savoir qu’elle est son rôle dans la famille.

-Excuse ta maman ma puce, elle est un peu maladroite ! S’exclame ma mère en venant à ma rescousse. Elle se penche vers Joy et lui fait de grands sourires. Tu as bien mangé ?
-Oui Mamie ! Je veux jouer ! S’exclame joyeusement ma fille en sautillant comme un beau diable sur sa chaise, visiblement pressée de pouvoir se déplacer librement.
-Non ma puce. D’abord, il va falloir que tu prennes un bain !
-Un bain ?
-Oui un bain mais tu verras c’est rigolo de jouer avec l’eau !
-Oui !!!

Alors qu’elle se redresse pour ensuite libérer Joy, ma mère affiche aussitôt une grimace avant de poser une main dans son dos. Je m’avance alors vers elle, inquiète pour son état physique.
-Qu’est-ce qui t’arrive maman ?
-Ce n’est rien, je me suis redressée trop vite. Me répond ma mère en tentant de se masser le bas du dos. Tu peux sortir Joy de sa chaise s’il te plait ? Elle va être intenable sinon.
-Euh, oui. Accepté-je bon gré mal gré. Je me tourne donc vers la chaise haute, face à ma fille qui s’impatiente. Je soupire puis je débloque le plateau pour ensuite soulever Joy pour la prendre dans mes bras. Aussitôt, je la vois faire la grimace. Visiblement, elle aurait préféré être dans les bras de sa grand-mère. Je n’attends donc pas plus longtemps pour la reposer sur le sol.

-Aoutch ! S’exclame une nouvelle fois ma mère en se penchant vers l’avant.
-Maman, ça va ? M’inquiété-je alors.
-Je me suis coincée le dos ! Me répond-t-elle, la douleur se percevant dans la voix. Elle ne bouge pas d’un pouce, comme si elle n’osait pas faire le moindre mouvement de peur d’avoir mal.
-Mamie bobo ? Interroge alors Joy, intriguée par l’attitude de sa grand-mère.
-Oui, Mamie a bobo au dos. Confirme-t-elle alors, avant de s’adresser à moi. Dis, tu peux lui faire prendre son bain ? J’en suis bien incapable et ton père est sorti faire les courses.
-Mais…
-S’il te plait, pour aider ta vieille mère. Insiste-t-elle sur un ton implorant, un poil exagéré. Je plisse les yeux, suspicieuse. Elle n’oserait quand même pas jouer la comédie, tout de même ?
-Bon, si ça peut t’aider. Finis-je par abdiquer, me penchant une nouvelle fois pour prendre ma fille dans les bras. Repose ton dos surtout. Ajouté-je en me dirigeant vers la salle de bain.
-Compte sur moi ! Confirme-t-elle joyeusement, avant d’aller rapidement se poser sur le canapé, arborant un air fier sur le visage.
J’en étais sûre, qu’elle jouait la comédie !

Dépitée de m’être faite avoir comme un bleu, je m’exécute tout de même en emmenant Joy dans la salle de bain. J’ouvre le robinet de la baignoire pour faire couler l’eau. Pendant ce temps-là, je me débats avec ma fille pour la déshabiller et commencer à la coiffer. Ainsi, cela évitera qu’elle ait des nœuds dans les cheveux.
Cependant, la demoiselle ne se laisse pas faire et réclame sa mamie. Je tente de lui expliquer qu’elle va devoir se contenter de sa maman, elle ne veut rien entendre. Je soupire, et après avoir vérifié la température de l’eau, je l’installe dans la baignoire pour commencer à la laver.

-Tu vois, c’est rigolo de prendre un bain. Lui dis-je tandis que je la vois jouer avec l’eau avec ses mains.
-Oui. Me confirme-t-elle calmement. Mais plus drôle avec Mamie ! Ajoute-t-elle en affichant un grand sourire innocent. Dans la seconde qui suit, elle s’amuse à m’éclabousser en riant joyeusement.
Je soupire en m’essuyant le visage. Elle ressemble peut-être à un ange, mais au fond, c’est une vraie chipie cette gamine ! Comme sa grand-mère, la malade imaginaire !

Génération Rose – Génération 2 – Chapitre 8

J’ai du mal à m’occuper de Joy. C’est ma fille mais c’est comme si l’information ne s’est pas complètement intégrée dans mon cerveau. J’ai beau me répéter qu’elle est mon enfant, ainsi que mes devoirs et obligations vis-à-vis d’elle, je n’arrive pas à m’approcher d’elle. Je parviens à aller dans sa chambre, à l’observer dans son berceau, mais cela s’arrête là.
C’est dans ces moments-là que je bénis le ciel d’avoir encore mes parents. Ils s’occupent de leur petite-fille avec plaisir, de jour comme de nuit. Même pour changer ses couches, ils le font avec le sourire. Ils aiment Joy, cela se voit et cela me réchauffe le cœur. Mais en même temps, je culpabilise. Pendant qu’eux, se lèvent la nuit quand elle pleure, moi je me rendors aussitôt. Parfois, je suis tellement fatiguée que je ne l’entends même pas.

J’ai tellement honte de moi que je me réfugie dans le travail. Là-bas, je peux être quelqu’un d’autre. Une autre femme, une qui ne soit pas une mère indigne. Certes, mes collègues me demandent des nouvelles de ma fille, mais j’élude la question en disant qu’elle va bien. Généralement, ils n’insistent pas et on passe à autre chose.
Cela me va très bien.
Par moment, je profite même de l’été qui s’éternise en intervenant en extérieur. Je vais à la rencontre des gens pour leur parler de l’association, de la cause féministe, en espérant éveiller leur conscience, voire recruter des bénévoles ou obtenir des dons.

Généralement, j’ai plutôt tendance à aller vers les hommes afin de discuter féminisme avec eux. Le challenge est généralement plus intéressants et cela m’amuse d’essayer de déconstruire les stéréotypes qu’ils considèrent comme une vérité absolue. Avec les plus ouverts, cela donne des conversations intéressantes et j’ai vraiment l’impression d’agir, de faire avancer les choses.

C’est tellement agréable de sortir comme ça, d’aller à la rencontre des gens, des inconnus… Je me sens tellement bien. Je passe des heures à San Myshuno, je me balade de quartier en quartier et mon esprit s’aère, s’évade, se concentre sur autre chose. Mon travail me passionne et cela me fait du bien… Même si je passe peu de temps à la maison par conséquent.
Certes, je fuis. Mais j’en éprouve le besoin pour garder la tête hors de l’eau. C’est par le travail que je me suis remise du départ de Sven, c’est par le travail que je me remettrai de ma stérilité.

En me baladant dans le quartier, j’ai croisé Manon devant la salle de sport. Cela fait un moment que je ne l’ai pas vu. Depuis que nous avons terminé le lycée, en fait. Je vais aussitôt à sa rencontre, ravie de la revoir.
-Coucou Manon ! Tu vas bien ? Ca fait un baille ! M’exclamé-je alors qu’elle me sourit.
-Salut Rosie ! Ca va bien et toi ? Qu’est-ce que tu fais ici ? Il me semble que tu vis toujours à Willow Creek…
-Ca va aussi….. Oh moi je travaille. Je me suis engagée dans une association pour promouvoir la cause féministe. Et toi, tu deviens quoi ?
-Oh c’est cool ça ! Faudra que tu m’en parles plus en détail mais j’ai pas trop le temps là. Oh moi, j’ai été prise dans un cabinet de stylistes. C’est plutôt cool ! Bon, faut que je te laisse, j’ai un rendez-vous ! Eh, on peut se voir en boîte ce soir si tu veux ? Invite toute la bande, ça peut être sympa !
-Bah pourquoi pas, oui ! Ca peut-être cool ! Accepté-je sans réfléchir. Cela ne pourra pas me faire de mal de sortir avec mes amis et je ne m’en suis pas accordée depuis longtemps.

Etant donné mon programme de ce soir, je décide de ne pas rentrer trop tard du travail. Lorsque j’entre dans la maison, tout est calme et j’entends juste le son de la télévision. Mes parents sont en train de regarder un film. Cela doit être l’heure de la sieste de Joy s’ils se permettent de suivre un long-métrage. Ils me sourient en me voyant et je vais les rejoindre sur le canapé.
-Tu as passé une bonne journée ? Me demande ma mère sans quitter l’écran des yeux.
-Tranquille. J’ai croisé une copine à San Myshuno, elle m’a proposé de sortir ce soir. Du coup, j’ai proposé aux autres de venir. Ca va être cool!

-Tu es sûre que tu veux sortir ? Me demande ma mère après un silence gêné.
-Bah oui pourquoi ? Lui réponds-je, sans comprendre où elle veut en venir. Je suis majeure et j’ai parfaitement le droit de sortir sans avoir besoin de l’autorisation de mes parents.
-Je ne sais pas … Semble-t-elle hésiter, comme si elle marchait sur des œufs. Tu passes déjà beaucoup de temps en dehors de la maison, je me disais… Que peut-être tu voudrais rester un peu à la maison… Pour faire connaissance avec ta fille notamment.
-Maman… Je suis là tous les soirs. Soupiré-je en regardant mes pieds. Je ne suis pas sortie depuis la naissance de Joy et cela n’a rien changé quant à ma relation avec elle. Ce n’est pas restant ici ce soir que cela va changer quelque chose. Je ne peux pas pour l’instant, c’est tout.
-Je sais que c’est difficile ma puce. Tu as fait un déni de grossesse, ton accouchement a été difficile… Tu as besoin de temps pour accepter Joy dans ta vie et c’est normal. Mais je ne suis pas certaine que c’est en t’enfuyant de la maison à la moindre occasion que la situation va s’arranger.
-Ca va aller Maman, je gère. Secoué-je la tête, refusant de me confronter à la réalité. Je me lève aussitôt du canapé, ne voulant pas poursuivre cette conversation. Bon, je vais aller me préparer pour ce soir.
-Ma puce, ne te vexe pas. Je te dis ça seulement parce que je ne veux pas que tu ais des regrets plus tard. Et puis, avec ton père…
-J’ai compris Maman, mais ça va.

Malgré la désapprobation de mes parents, je prends quand même le temps de me préparer pour passer la soirée dehors. Je fais un peu plus attention à mon apparence que d’habitude. Je me fais belle, je travaille mes cheveux, ma tenue. Une fois prête et une fois que Manon m’a confirmée le lieu par message et que Caroline m’a dit qu’elle serait là, je file en dehors de la maison sans laisser le temps à mes parents de me dire quoique ce soit.
Une fois à Windenburg, je retrouve mes amis. Cela me fait un bien fou de les retrouver. Ce soir, j’ai l’impression d’être comme eux. Je ne suis plus une jeune maman célibataire, je suis une jeune femme, leur amie de longues dates.

-Tu es super belle Rosie ! Me complimente Caroline tandis que je la rejoins au bar.
-Merci ! J’ai eu envie de faire un effort ce soir !
-Ca va aller de laisser ta fille à tes parents ? Ils n’ont pas trop râler ? S’inquiète subitement ma meilleure amie pendant que je me commande un verre. Enfin je peux enfin me faire plaisir !
-Non, t’en fais pas. Ils sont gagas devant leur petite-fille ! Mais ce soir, je ne suis plus une maman ! Ok ?
-Ok ! Profitons de cette soirée ! S’enthousiasme Caroline en affichant un grand sourire.

Pour être tout à fait honnête, j’étais un peu nerveuse de venir ici. Je ne savais pas comment j’allais réagir face à une situation de la vie quotidienne. Je suis jeune et les jeunes de mon âge sortent le soir. Ils vont en boîte et s’amusent.
Mais je ne suis plus tout à fait une jeune femme « normale ».
Cependant, je parviens sans problème à entrer dans l’ambiance. La musique, mes amis m’aident à oublier la maison et à me concentrer sur l’instant présent. Cela me fait un bien fou !
Je commande un verre de jus de fruit. Puis un deuxième. Ce n’est peut-être pas raisonnable, mais cela me fait du bien. J’arrive à me détendre et je suis prête à profiter de la soirée sans me prendre la tête !
Lors du troisième, j’en offre un à Caroline et vais pour lui apporter quand je croise un ami.
-Eh beh ! Tu n’y vas pas à moitié dis moi !
-Te fais pas de film, l’autre est pour Caro ! Par contre tu la kiffes ta boisson de filles ? Le taquiné-je en remarquant son cocktail dans la main.
-No comment la féministe ! Rétorque-t-il en riant. Je me joins à lui en riant à mon tour puis je pars à la recherche de ma meilleure amie.

La soirée suit tranquillement son cours. La nuit est complètement tombée dehors et la boîte s’est remplie. Après avoir consommé plusieurs verres au bar, nous nous sommes tous dirigés vers la piste de danse. C’est le moment de se laisser porter par la musique et se défouler en rythme en laissant le DJ mener la danse.
J’ai l’esprit embrouillé par le jus de fruit. Je me sens tout à coup ridicule d’être ici, comme si de rien n’était. Je n’ai pas envie de penser à ça. J’ai envie de m’amuser, d’être insouciante. Je n’ai pas envie de me prendre la tête. Je respire un grand coup. Je me concentre sur la musique et je déhanche davantage. C’est triste de se laisser submerger par des émotions négatives en soirée. Je ne veux pas être quelqu’un de triste. C’est nul… d’être triste. 

Un mec m’aborde durant la soirée. J’ai encore bu quelques jus de fruits et je n’ai plus tout à fait les idées claires. Je ne comprends pas toute suite ce qu’il cherche à faire lorsqu’il s’approche de moi pour danser avec moi et qu’il commence à me parler. Quand je comprends qu’il me drague, je m’amuse à flirter avec lui. Je ne fais rien de mal et c’est amusant. Je teste mes capacités de séduction.
En cet instant, je me sens femme, pendant que je flirte et que je vois dans ses yeux que je lui plais.

Nous continuons notre jeu de séduction. Je ne sais pas comment il s’appelle. Et à vrai dire, je m’en fiche. Je n’ai pas l’intention de le revoir par la suite. Si ça se trouve, je me souviendrai à peine de lui demain. Mais pour l’instant, je m’amuse comme une folle. Je me sens désirée. Je me sens femme. Cela me fait tellement de bien ! Cela fait tellement longtemps que je ne me suis pas sentie ainsi !
J’ai même osé l’embrasser ! Nous ne nous sommes pas lâchés de la soirée, à nous embrasser et nous toucher. Mais rien de plus, je suis restée sage. J’aurais pu, après tout, je n’ai aucun risque de tomber enceinte cette fois-ci. Mais j’avais pas envie. Je voulais juste flirter et m’amuser, rien de plus.

Quand je suis rentrée, mes parents dormaient déjà. Le lendemain matin, ils ne me disent rien. J’ai mal à la tête au petit déjeuner et je vois le regard désapprobateur de ma mère. Mais je m’en fiche. J’ai des souvenirs flous mais je me suis bien amusée. Je ne regrette rien et c’est légère que je pars au boulot, laissant ma mère préparer le biberon pour Joy.

Entre mon travail et mes sorties, je ne vois plus le temps passé et je me sens enfin plus légère. Mes parents n’approuvent pas mais ils me laissent faire. Je sais qu’ils voudraient que je me rapproche de ma fille, mais c’est bien la dernière chose dont j’ai envie pour le moment. Elle me rappelle trop Sven, trop ma stérilité. Pour le moment, elle est bien mieux avec ses grand-parents.
Puis, vient son anniversaire. Ma fille grandit et devient un bambin. J’ai du mal à réaliser qu’elle va se mettre à gambader partout maintenant, et qu’elle n’est plus limitée à son berceau.
Je suis au travail quand mes parents célèbrent son anniversaire. J’ai une journée particulièrement remplie aujourd’hui et mes parents le comprennent bien. Et malheureusement, Joy ne peut pas m’attendre pour grandir !